Auteur : Susan Sontag

Depuis cent cinquante ans qu'elle existe, la photographie a accompli — personne ne peut plus l'ignorer — toutes ses révolutions. Y compris la plus essentielle, qui est d'être devenue tout à la fois l'art de masse par excellence et un langage universel immédiat.

Ces dernières années, les galeries traditionnellement vouées à l'art pictural se sont ouvertes aux expositions de photo, à New York, à Rome, à Genève, à Tokyo, à Paris et ailleurs : des Fondations nationales de la photographie sont créées un peu partout et les Bibliothèques nationales elles-mêmes rachètent des fonds importants et des collections particulières.

Mais. curieusement, si l'on ne compte plus les monographies consacrées aux « grands » de la photo, les numéros spéciaux de revues spécialisées, les catalogues d'expositions et les Histoires de la photographie, il existe très peu d'essais, de livres de réflexion qui tentent d'analyser à la fois le phénomène lui-même, les caractéristiques de son expression et sa fonction dans la société contemporaine.

Après Moholy-Nagy et Walter Benjamin — parmi les premiers qui s'y sont voués — il appartenait à Susan Sontag, romancière, essayiste et cinéaste américaine, d'écrire le livre le plus complet et le plus approfondi à ce jour sur la photographie, à travers une série de textes publiés à l'origine dans le New York Review of Books qui firent grand bruit et devaient soulever une longue suite de polémiques. Ces articles ont été repris, détaillés, complétés et augmentés d'une anthologie de citations sur la photo, qui vont de Kafka à Agatha Christie, en passant — notamment — par Wittgenstein, Nietzsche, Man Ray, Jasper Johns ou Henri Cartier-Bresson.

L'ensemble du livre correspond bien à cette définition que Carlos Fuentes avait un jour donnée des essais de Susan Sontag : que c'était toujours des « interprétations de haut niveau, réussies, sur tout ce qui est vraiment en train de se passer aujourd'hui, sous nos yeux ».